Il y a tout juste 130 ans, le 18 décembre 1892, a eu lieu la première mondiale du célèbre ballet « Casse-Noisette » au théâtre Mariinskï de Saint-Pétersbourg.
Nous devons ce ballet féerique à 4 génies franco-russes :
Prince Ivan Vsevolojski (1835-1909, Saint-Pétersbourg), décorateur, dessinateur, directeur des théâtres impériaux. C’est à lui qui nous devons la naissance de ce célèbre ballet. Avant d’être nommé directeur des théâtres impériaux, il a travaillé comme conseiller à l’Ambassade de Russie à Paris. Francophile et francophone, il est passionné par l’époque du Roi Soleil. On sentait dans les spectacles qu’il dirigeait l’influence de l’époque française du XVIIIe. C’est Ivan Vsevolojski qui a dessiné en personne les esquisses des costumes pour la première du ballet « Casse-Noisette ».
Piotr Tchaïkovskï (1840-1893, Saint-Pétersbourg), l’un des plus grands compositeurs de l’époque romantique, chef d’orchestre. « Casse-Noisette » était le troisième et dernier ballet composé par Piotr Tchaïkovskï. Après le succès du « Lac des cygnes » (1876) et de « La Belle au bois dormant » (1889), Piotr Tchaïkovskï a reçu la commande de la direction des théâtres impériaux pour composer un opéra en un acte et un ballet en 2 actes afin que les deux puissent être présentés dans la même soirée. Il choisit l’opéra « Yolande » et le ballet « Casse-Noisette ». Après
« La Belle au bois dormant », ce fut le deuxième projet avec Marius Petipa.
Marius Petipa (1818, Marseille-1910, Gourzouf, Crimée), danseur, maître de ballet et chorégraphe. Il est l’auteur de livret de ballet « Casse-Noisette ». Il est considéré comme le « père du ballet russe ». Natif de Marseille, il arrive en Russie à l’âge de 29 ans et y reste jusqu’à sa mort. Il commence sa carrière comme premier danseur au Ballet Bolchoï Kamenny de Saint-Pétersbourg (actuellement Conservatoire de Saint-Pétersbourg) dans le ballet « Paquita » et devient ensuite maître de ballet du théâtre Marinskï de 1869 à 1904. Il aura consacré 60 ans de sa vie à la Russie. La Belle au bois dormant, Casse-Noisette, Le Lac des cygnes, Raymonda, Don Quichotte… Au fil des années, vivant en Russie impériale, Marius Petipa aura mis en scène plus de 60 ballets, dont la moitié était composé de ses propres créations. Il a œuvré avec les étoiles des plus grands théâtres du pays – avec le Théâtre Bolchoï de Saint-Pétersbourg, avec le Théâtre Mariinsky ainsi qu’avec le Théâtre Bolchoï de Moscou. « J’ai créé une troupe de ballet dont le public disait : c’est le meilleur ballet d’Europe. Et c’est parce que j’ai fait monter sur scène des artistes réellement talentueux, car j’ai toujours travaillé au nom du grand art de la chorégraphie », soutiendra le maître français dans ses mémoires. Marius Petipa est décédé à Gourzouf en Crimée le 14 juillet 1910 où il passait ses vacances en famille. Il repose au cimetière de la Laure St. Alexandre NEVSKÏ à Saint-Pétersbourg.
Lev Ivanov (1834, Moscou-1901, Saint-Pétersbourg), diplômé de l’Ecole théâtrale de Saint-Pétersbourg, danseur de caractère au Mariinskï entre 1852-1893, il interprète de nombreux rôles mimés, dont Phoebus dans « La Esméralda » et Conrad dans « Le Corsaire ». Assistant de Marius Petipa au Théâtre Mariinski, il compose une vingtaine de ballets dont certains ensemble. Il est coauteur avec Marius Petipa du « Lac des cygnes » (1895), ballet réalisé en hommage à Piotr Tchaïkovskï. Il a également imaginé la chorégraphie de la première version de « Casse-Noisette ». Lev Ivanov est considéré comme « l’âme du ballet russe ».
Le récit de la création du ballet « Casse-Noisette » et son lien avec la France :
Après le succès du conte « Casse-Noisette et le Roi des souris » d’Ernst Hoffmann, le petit jouet en bois « Casse-Noisette » envahit les marchés de Noël du monde entier. Vers 1890, cette figurine en bois devient l’un des cadeaux préférés des enfants pour Noël. Après le succès du ballet « La belle au bois dormant », la direction des théâtres impériaux russes s’est adressée à Piotr Tchaïkovskï en lui demandant de composer une musique pour le ballet imaginé du conte Hoffmann. A l’époque, la troupe du ballet Mariinski est dirigé par le français Marius Petipa. Ne connaissant pas l’allemand, Marius Petipa, maître de ballet, privilégie pour le livret la version française, écrite par Alexandre Dumas-père « Histoire d’un Casse-Noisette ». L’idée plait beaucoup à Ivan Vsevolojskï, alors directeur des théâtres impériaux, très attaché à la France.
Il faut préciser que cela se déroule à l’époque de la signature de l’alliance franco-russe. En 1891, l’Empereur Alexandre III recevait à Kronchtadt l’escadre française. Les théâtres impériaux sont considérés comme des vitrines gouvernementales et diplomatiques. Initialement, ce ballet est envisagé pour saluer l’alliance avec la France.
Dans la première version de ce ballet, on remarque quelques touches à la française. A cette époque, la France célèbre le centenaire de la Révolution. Les costumes des danseurs ont été réalisés dans le style de l’époque Directoire et le premier Casse-Noisette porte sur la tête un bonnet phrygien, symbole populaire de la Révolution française. La musique comporte également une petite touche française. On remarque une transcription des chansons françaises « Bon voyage, Monsieur Dumollet » et « Cadet Rouselle ».
Gravement malade, Marius Petipa confie alors la chorégraphie à son second, Lev Ivanov.
La première eu lieu le 18 décembre 1892 au théâtre Marinskï sous la direction du chef d’orchestre italien Riccardo Drigo (1846-1930, Padoue). Ce ballet est accueilli très chaleureusement par le public. Mais certains critiques trouvent le ballet ennuyeux et composé de danseurs trop jeunes, peu expérimentés. Stanislava Belinskaya (Clara/Marie – photo ci-dessus) n’avait que 12 ans.
Le public du Bolchoï voit ce ballet pour la première fois en 1919. Les esquisses des costumes pour ce ballet ont été réalisées par Konstantin Korovine (1861, Moscou-1939, Paris), décorateur, écrivain, peintre-impressionniste, Chevalier de la Légion d’Honneur ( décret du 28 décembre 1900).
Aujourd’hui, cette œuvre est sans doute l’un des ballets les plus populaires au monde et certainement un classique incontournable en période de fêtes.
Depuis toujours, cette œuvre a attiré les plus grands chorégraphes : Vassilï Vainonen, Georges Balanchine, Yuri Grogorovitch, Rudolf Noureïev, Maurice Bejart ou encore Thierry Malandain.
Le 5 janvier 2023, au Bolchoï, le rôle de Marie sera interprété par Evguenia Obraztsova, prima du Bolchoï et lauréate de La Renaissance Française (promotion 2018).
https://larenaissancefrancaise.org/RUSSIE-ceremonie-annuelle-de-remise-des-distinctions
Le ballet Casse-Noisette rassemble les petits et les grands en cette période de fêtes de fin d’année. Ce moment de l’année où l’on se plonge dans le monde des rêves …
Que la musique de Piotr Tchaïkovskï et la féérie des danses de « Casse-Noisette » vous bercent durant toutes ces fêtes.
Très belles fêtes de Noël et de fin d’année.
С наступающим Вас Новым годом и Рождеством Христовым.
Photos : La Renaissance Française , RIA Novosti ;
Sources :
– « Théâtre Mariinskï, Ballet du XXs. », Julia Yakovleva , 2005 /Мариинский театр. Балет. XX век. Юлия Яковлева, , ноябрь 2005г;
– « Le ballet russe de l’époque de chefs d’œuvres », Julia Yakovleva , 2018/ «Создатели и зрители: русский балет эпохи шедевров», Юлия Яковлева, Новое литературное обозрение, 2018 ;