La troisième conférence commune de la Délégation de Sarre et les archives municipales de Sarrebruck s’est tenue le jeudi 28 juin 2025. Cette fois-ci, le thème était en rapport avec la Grande Région SaarLorLux. Christof Vièl, Président de la Délégation de Sarre, a donné une conférence sur le droit local en Alsace-Moselle. La conférence a attiré un public nombreux et les organisateurs ont également proposé une nouveauté en matière de présentation. Une traductrice (Marie Galimard) a pris le relais du conférencier à intervalles réguliers et a traduit ses propos en français sous forme de résumé. Il s’agissait là d’un petit service inédit proposé par les archives municipales de Sarrebruck. L’objectif est d’utiliser cette approche pour toucher un nouveau public au-delà de la frontière allemande, avec des thèmes qui, de par leur nature, dépassent les frontières. Les habitants de la Grande Région doivent se sentir concernés.
Dans son exposé parfaitement structuré, Christof Vièl a d’abord examiné de plus près l’histoire du droit local en Alsace-Moselle, avant de présenter des exemples d’application et a conclu par un bref aperçu de l’avenir de cette tradition juridique encore en vigueur aujourd’hui dans les trois départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle. Comme l’a souligné Christof Vièl au début de son exposé, ce droit local revêt le statut de loi nationale en France et jouit de rang constitutionnel. Curiosité : ce n’est qu’en 2013 que les articles de loi du droit local ont été traduits en français ! Cela signifie que jusqu’alors, les textes de loi n’étaient disponibles qu’en allemand !

L’histoire du droit local commence en 1801 avec le Concordat conclu par Napoléon Ier avec le Saint-Siège. Après la guerre franco-allemande (1870/1871), l’Alsace-Moselle est devenue territoire allemand et a été soumise à la législation allemande jusqu’en 1918. Après le retour de l’Alsace-Moselle à la France en 1918, l’État français a d’abord maintenu le droit allemand et décrété en 1924 l’application du droit français tout en maintenant le droit local allemand. L’histoire mouvementée de ce droit se poursuit comme suit : en 1940, abolition du droit local en raison de l’occupation allemande, en 1944, réintroduction du droit local.
Il s’ensuivit des exemples d’application de ce droit, qui couvre pratiquement tous les domaines de la vie, du droit du travail au droit des associations, en passant par le cadastre/registre foncier, le droit communal, la justice, la religion et même des particularités du droit de chasse et du droit de distillation. Voici quelques exemples marquants de réglementations spéciales dans le domaine juridique de l’Alsace-Moselle, qui remontent à la période allemande et ont été préservées : le maintien du salaire en cas de maladie dès le premier jour et l’obligation de repos dominical, qui empêche notamment les supermarchés d’ouvrir le dimanche matin. Tout le monde connaît l’absence de séparation entre l’État et l’Église dans cette région, ce qui fait que les ecclésiastiques (catholiques, protestants et juifs) sont rémunérés par l’État français. Le « privilège » dont profite encore aujourd’hui cette région, à savoir deux jours fériés supplémentaires par an (le Vendredi Saint et le lendemain de Noël), est également connu et envié dans toute la France. La liste des dispositions spéciales encore en vigueur aujourd’hui pour la population d’Alsace-Moselle est encore longue…
Au cours de la table ronde qui a suivi, la question de la viabilité future du droit local a notamment été posée. Selon l’intervenant, celui-ci n’est pas menacé pour l’instant, ce qui s’explique d’une part par le fait que, tout au long de l’histoire et de l’évolution du droit local, des institutions se sont constituées pour le défendre, notamment l’Institut du droit local alsacien-mosellan (IDLAM), dont le siège est à Strasbourg. Selon le conférencier, les dispositions particulières liées au droit local sont généralement considérées par la population locale comme un acquis social, ce qui signifie que la suppression du droit local se heurterait certainement à la résistance des Alsaciens et des Mosellans ; une opinion qui, on peut le supposer, est également partagée par l’administration française !
