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Intronisation du chancelier GABRIEL DE BROGLIE nouveau Président d’honneur de LA RENAISSANCE FRANÇAISE – Discours

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INTRONISATION DU CHANCELIER GABRIEL DE BROGLIE NOUVEAU PRÉSIDENT D’HONNEUR DE LA RENAISSANCE FRANÇAISE

Réponse de Monsieur Gabriel de Broglie

Monsieur le Président international,

Je veux tout d’abord vous remercier des propos que vous venez de tenir, et notamment de ce que vous avez dit à mon endroit qui me touche infiniment, qui m’intimide presque devant l’importance que vous m’attribuez dans les grands objectifs que sont ceux de La Renaissance Française. Sachez que je suis extrêmement touché de votre appel, de la démarche que vous avez faite en me demandant de venir vous rejoindre et que je suis déterminé à tenter de faire ce que vous venez si bien de caractériser. Merci beaucoup de vos propos.

Messieurs les Ambassadeurs, Madame l’Ambassadrice, Madame la Représentante de la Secrétaire générale de l’Organisation internationale de la Francophonie, Monsieur le Directeur de cabinet du Grand Chancelier de la Légion d’honneur, chers confrères, Madame le Ministre, Monsieur le Ministre, Monsieur le Président et Monsieur le Secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences d’outre-mer, Monsieur le Secrétaire général de La Renaissance Française, Mesdames et Messieurs les membres du conseil d’administration de La Renaissance Française, Mesdames les présidentes de délégation, Messieurs les présidents de délégation, Mesdames, Messieurs, j’ai envie de dire, chers amis, merci de votre présence, d’être venus de bien des endroits. J’ai été heureux de savoir que de nombreuses délégations étrangères étaient représentées aujourd’hui. La présence de presque tous les continents, peut-être tous d’ailleurs, m’impressionne. Je suis particulièrement sensible à cet aspect général et extrêmement étendu de La Renaissance Française et de ses missions.

Je m’associe de grand cœur aux paroles que vous avez prononcées à propos de la mémoire de Simone Veil. Je suis heureux de le dire en présence de ses deux fils.

Je voudrais vous dire que, au moment où nous faisons connaissance – car il y a peu que nous nous rencontrons – je suis ce soir heureux d’être parmi vous. J’éprouve une impression réconfortante. Est-ce qu’on est maître de ses impressions ou est-ce qu’on les a rationalisées, intériorisées, je ne sais pas. Je vais essayer de vous dire pourquoi.

Depuis ma jeunesse, j’ai été poursuivi par une expression, un leitmotiv, qui pourrait être une devise, car elle avait une signification engageante. D’ailleurs, elle n’est nullement contradictoire avec celle de ma famille qui est «Pour l’avenir». Cette expression, sans cesse répétée, je vous la livre:«Hors des sentiers battus».

Pour prendre le bon chemin, il est préférable de le chercher hors des sentiers battus. J’y ai pensé toujours, mais, ce que vous avez dit d’ailleurs le confirme, je n’y suis pas arrivé. Et cependant, lorsque le Président Fadda m’a proposé de vous rejoindre, je me suis dit que c’était pour moi une voie hors des sentiers battus. Je ne connaissais pas La Renaissance Française, et puis il m’a dit : «Il s’agit de la succession de Simone Veil». J’ai ressenti cela comme un appel, un appel de sympathie.

Nous nous connaissions depuis près d’un demi-siècle, elle jeune magistrate, et moi auditeur au Conseil d’Etat. Nous ne nous sommes jamais perdu de vue, et comme vous l’ avez dit, nous avons siégé sur des fauteuils voisins à l’Académie française, l’un à côté de l’ autre. Il s’en est suivi de nombreuses séances où nous avons bavardé, peut-être commenté, puis… le silence est intervenu !

J’ai assisté aux différentes cérémonies, la première célébration à l’Académie française aussitôt après son décès, les funérailles nationales, l’entrée au Panthéon, et bientôt l’entrée de son successeur à l’Académie française, qui aura lieu, probablement, avant la fin de l’année.

Peut-être, pour expliquer ce lien tout à fait particulier, je dirais que, à un certain moment, j’ai pu jouer un rôle dans son entrée à l’ Académie française. Simone Veil n’a probablement pas pensé la première à être candidate à l’Académie.Il se trouve qu’à la mort de Pierre Messmer – j’étais le successeur de Pierre Messmer – nous évoquions la succession à laquelle il fallait se préparer. Sans que le nom de Simone Veil ait encore été prononcé, en m’entretenant avec quelques-uns, comme on le fait d’habitude dans ces circonstances, j’ai simplement dit : « Pierre Messmer était une icône ; pour lui succéder, il nous faut une icône ! Simone Veil est une icône». Le propos s’est diffusé et je l’ai retrouvée à
l’Académie française.

Je veux vous dire que je reste attaché à ces souvenirs et que ce fut une des rencontres importantes de ma vie.

Le Président Fadda m’a dit encore: « Maurice Schumann. ». Alors là, nous n’étions pas non plus hors des sentiers battus. Vous avez rappelé ma grande amitié, mon admiration et ma collaboration avec Maurice Schumann qui se poursuivent encore avec sa fille aujourd’hui. Ces choses demeurent !

Vous avez, Monsieur le Président, indiqué les circonstances de la création de La Renaissance Française et, également, les principales missions de cette organisation prestigieuse. Les domaines d’intervention de La Renaissance Française sont eux, originaux, bien spécifiques, et à les entendre décrire comme vous l’avez fait, hors des sentiers battus.

Mais regardons peut-être de plus près :

L’Europe tout d’abord, ou plutôt la cause européenne, le désir d’Europe, hors de la toute puissante bureaucratie bruxelloise, celle-là est hors des sentiers battus, encore.

Une présence dans les régions et les territoires en France, hors de France et même hors de la Francophonie, dans de nombreux pays étrangers : vous vous étendez sur une très grande carte. Les sentiers battus n’y ont aucune place !

La situation des territoires et la difficulté à mettre fin à une excessive centralisation parisienne, la diversité des interventions de La Renaissance Française, une insistance sur la tradition, sur les talents et peut-être le génie de l’esprit français et sa résonance internationale.

Mais alors, en dehors de la domination anonyme et commerciale des grands réseaux de diffusion qui envahissent notre société, tous ces domaines constituent, me semble-t-il, une sorte d’institution originale. Nous cheminons donc bien hors des sentiers battus. Je reste réconforté.

Ayant dit cela, je suis aussitôt pris d’un doute. Ces thèmes qui sont les vôtres depuis longtemps, ne les retrouve-t-on pas parmi ceux évoqués, en ce moment même, au sein d’un grand débat national qui se déroule sous nos yeux et à la suite d’un mouvement qui a secoué et secoue encore peut-être la société ?

Je reprends l’exemple de l’Europe. Nous éprouvons tous pour la cause européenne une appartenance, un attachement très fort, une sorte de sentiment familial. Ce thème est précisément à l’ordre du jour, par une lettre adressée à tous les citoyens européens par le Président de la République. Il a même pris comme cri de ralliement « La renaissance européenne » ! Bien entendu, nous nous rallions à ce slogan pour lequel vous pouvez faire valoir une antériorité, sachant que la renaissance européenne passe par la renaissance française.

Je suis sur le point d’abandonner mon slogan « Hors des sentiers battus ». Il convenait peut-être à un jeune homme d’une société très traditionnelle, mais pas à un monde pris dans un tourbillon. Il n’est pas de jour où nous ne découvrions un nouveau bouleversement imprévu, qui nous dérange :

▪ la renaissance des empires et des nationalismes.
▪ la dissolution progressive du droit des gens fondé sur nos valeurs universelles, par le rejet du multilatéralisme.
▪ les mouvements incontrôlés des populations.
▪ la nouvelle course aux armements nucléaires ; nous avons connu cela, il y a un demi-siècle, mais ça recommence.
▪ une apparition dans les forces armées de robots de plus en plus perfectionnés qui, un jour, seront peut-être armés.
▪ la voiture électrique sans conducteur pour demain.
▪ l’abandon de toutes sortes de choses qui font notre quotidien : les clés, la monnaie…

Tout cela nous arrive ensemble, sans aucune cohérence. On va ajouter les éoliennes qui détruisent nos paysages, les climats déréglés, la biodiversité menacée, la pollution envahissante. Internet, qui était conçu au départ comme un espace de liberté individuelle et d’épanouissement, petit à petit se transforme en un champ clos dirigé par les « big brothers » au service de tous les mauvais usages, comme on le découvre tous les jours.

Tout ceci n’est d’ailleurs rien en comparaison des crises générales qui se conjuguent à un niveau beaucoup plus abstrait : crise de l’autorité, de la tradition, de l’éducation, de la famille, de la démocratie, de la spiritualité. Ce n’est pas encore aujourd’hui que nous découvrirons que l’Occident est en décadence.

Mais aujourd’hui rassemblés, nous pouvons affirmer que la renaissance est l’exact contraire de la décadence. Il est au moins un domaine, comme vous l’avez très bien souligné, Monsieur le Président, qui paraît à l’écart de la décadence par nature et qui est la source de la renaissance depuis toujours : la culture. Et je n’entends pas forcément la création la plus audacieuse, mais la pratique de la culture, la création culturelle.Au cœur de la culture, il est un domaine plus précieux encore – vous l’avez dit – c’est celui de la littérature. J’ajouterai la poésie, qui est bien absente dans la création et la diffusion. Mais cependant, sur ce terrain, on peut dire que nous sommes plus rassurés, peut-être plus rassurés qu’avant d’ailleurs. Nous savons qu’internet n’a pas tué l’imprimé ; au contraire, il a plutôt évité que le livre ne disparaisse, comme cela avait été prévu.

La relève des auteurs écrivant en langue française, des bons auteurs, est assurée et pas seulement parmi les Français qui sont francophones de langue maternelle mais aussi avec les écrivains qui adhèrent volontairement à la langue française. Les domaines de la littérature ne sont jamais des sentiers battus. Ils sont parcourus, en ce qui nous concerne, par l’avenue la plus large, la plus belle, la plus célèbre : la langue française. Je sais que nous partageons cette cause, cette passion.

Pour ma part, je suis moins pessimiste que l’opinion générale. Je ne critique pas du tout le pessimisme, il est signe de conscience tout simplement et preuve de passion ; on peut le comprendre. Mais je crois réellement qu’aujourd’hui, et dans l’avenir, la langue française est un atout formidable, pas uniquement pour nous, très favorisés habitants de l’Hexagone, mais pour l’ ensemble des régions dans le monde, et en particulier pour celles qui ont un emploi de la langue française soit maternel, soit d’éducation, d’instruction. Et donc, cet atout formidable, il faut l’entretenir. On le fait par l’enseignement, par l’éducation : l’essentiel ! il faut s’en servir, il faut en parler ; je pense que je n’ai aucun mal à vous convaincre sur ce terrain et suis persuadé qu’ ensemble, comme vous avez bien voulu le suggérer, nous le pourrons donc, je m’en réjouis infiniment. Et non pas en dehors des sentiers battus, mais dans la promenade la plus agréable dont vous avez cité quelques exemples tout à l’ heure.

Donc, en commençant mon intervention, j’ai cherché la raison de cette impression réconfortante que je ressentais aujourd’hui, et bien voilà, peut-être la principale : la langue française, la littérature, ne nous décevront jamais dans notre œuvre de renaissance. Et pour conclure ces propos, j’ai envie de vous dire, Mesdames et Messieurs, de vous lancer cet appel : « N’abandonnons jamais nos sentiers battus ! ».

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