À l’occasion de la parution de son nouveau roman « L’encombrant souhait » publié en coédition par l’Harmattan et les éditions Saër Al-Mashrek, Joëlle Cattan dévoile la double mission qu’elle s’impose en écrivant : « Écrire avec la plume d’une auteure et me relire avec le regard d’une lectrice ».
L’auteure affirme être consciente et persuadée qu’en décidant de publier un roman, il est crucial d’œuvrer à véhiculer des messages et à maintenir un souffle. « Donner un sens et un rythme à une histoire racontée dans un roman est primordial », dit-elle, indiquant avoir aspiré dans son nouvel ouvrage à suspense, « à laisser réfléchir sur les dimensions multiples de notre existence, en particulier sur son implacable dualité, pour la rendre palpitante à tout moment.» Et d’ajouter aussi avoir souhaité marteler à travers son roman « que tant que des cœurs battront, il y aura toujours une renaissance ».
Commentant la couverture qu’elle a choisie pour son roman, Cattan explique qu’il s’agit d’une photo qu’elle a captée sur le mont Nemrud à 2200 mètres d’altitude au cours d’un voyage en Anatolie du Sud-est, qui exprime à ses yeux que « quelque soit le chemin à parcourir sur cette terre, il mènera soit nulle part, soit bien loin. »
Son opus est un roman à multiples facettes psychologique, sociale, policière, juridique et médicale qui se dégagent naturellement de l’histoire et du vécu des personnages auxquels les lecteurs s’identifieront facilement.
Histoire d’un psychologue quadragénaire entre rupture et bilan personnel
« L’encombrant souhait » est un roman qui raconte l’histoire d’un psychologue quadragénaire, Rémi Morel, qui est convaincu de la clémence de la vie à son égard et qui souhaite abandonner famille et carrière pour partir ailleurs vivre autrement.
Son projet de départ est obsessionnel et l’amène à confondre inconsciemment ses songes avec son véritable vécu, jusqu’à imaginer avoir annoncé son encombrant souhait.
Tentant de se raisonner au cours d’un de ses déplacements à l’étranger, il se livre à un bilan intime pour comprendre ce qui lui arrive : Un trop-plein d’obligations professionnelles ? De récents désaccords au sein de son couple ? Ou tout simplement un ras-le-bol général que seule la thérapie du vert serait capable de soigner ?
Entre introspection et rétrospection, il réussit à faire miroiter un supplément de motifs à l’origine du remaniement recherché.
Joëlle Cattan dans les méandres du trouble bipolaire
Interrogée sur les nombreuses thématiques de son roman, l’auteure expose la portée de quatre d’entre elles :
À travers l’encombrant souhait du personnage principal consistant à opérer une pause et une métamorphose dans sa vie en faisant miroiter son goût prononcé pour les grands espaces, les contours complexes de sa profession et les sentiers à la fois feutrés et agités de sa vie de couple, Cattan explique avoir tenu à dépeindre comment un couple qui s’aime d’amour pouvait se retrouver pris dans une spirale de non-dits et de malentendus et finir par basculer.
À travers la suspicion de bipolarité du fils mineur, l’auteure révèle avoir cherché à comparer le trouble bipolaire et ses dérèglements de l’humeur avec le double visage de l’existence -tantôt calme, tantôt en délire-, pour en déduire que s’il n’était pas possible d’échapper à cette bipolarité/dualité, il était salutaire de les accueillir toutes deux avec tact, sérénité et dignité. Et qu’une maladie nommée et traitée pouvait s’avérer moins dangereuse que d’autres désordres innommés, tus ou ignorés.
À travers l’addiction du voisin aux réseaux sociaux et surtout de ses suites, Joëlle Cattan précise avoir voulu fustiger l’utilisation abusive et à mauvais escient de ces plateformes virtuelles, et marteler combien le danger qui en résultait pouvait être nuisible et irréversible à plus d’un niveau dans ce monde en perte/quête d’identité.
Et enfin, à travers les bonnes ou les mauvaises résolutions et convictions de ses personnages, elle déclare avoir souhaité montrer que cette fermeté imprudente ou insolente pouvait être justifiée dans la majorité des cas par la propre histoire/trajectoire de chacun d’eux, et qu’il était dès lors inexact et injuste de la percevoir comme une adversité.
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En bref, « L’encombrant souhait »* est un roman inspirant dans lequel l’énigme est menée avec subtilité, sur fond d’une écriture puissante mêlant action et psychologie, imagination audacieuse et finesse poétique toutes deux chères à l’auteure.
* Disponible en versions numérique et papier sur :
https://www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=catalogue&obj=livre&no=66940
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Dans son troisième ouvrage, Joëlle Cattan nous mène, dans un parcours entre rêve et réalité, à travers les crises existentielles de l’âge adulte, aux confins du sens de la vie et d’une nécessaire renaissance.
PAR NADA NASSAR-CHAOUL
Un psychologue quadragénaire à qui tout sourit, milieu aisé, carrière professionnelle réussie, mariage avec une femme belle et sensible de qui il attend son troisième enfant, souhaite tout abandonner pour partir ailleurs vivre autrement. Cet « encombrant souhait » le pousse à des introspections et à des rétrospections obsessionnelles allant jusqu’à envisager, entre autres, un départ définitif, le suicide. Cette crise à la fois existentielle (fuir une planète devenue folle pour se rapprocher de l’essentiel, la nature) et sentimentale (suspendre sa vie conjugale dégradée après onze ans de mariage « pour l’observer et s’observer lui-même ») est-elle celle d’un adolescent adulte, d’un psychologue qui ne peut s’empêcher d’analyser ou reflète-t-elle, en réalité, les angoisses d’essence « féminine » de l’auteur ?
La saudade, ce sentiment familier au fado portugais, fait à la fois de nostalgie, de rêverie et d’un désir imprécis d’ailleurs est ce qui définit le mieux les états d’âme du héros que l’auteur réussit à peindre dans un tableau s’apparentant à un long rêve éveillé, ponctué des incohérences du cauchemar. Le réveil n’en est que plus brutal pour le lecteur lorsque la réalité, sous forme d’une cascade d’événements tragiques et imprévus, s’impose à lui dans la deuxième partie du récit, avec, en arrière-fond, des événements dramatiques « vécus » de la guerre du Liban.
La dextérité de l’auteur, sa sincérité et la profondeur de ses interrogations lui permettent de faire le lien entre ces diverses expériences de vie dans la très belle lettre posthume à la fois humaniste et poétique qui clôt l’ouvrage adressée par le héros à son fils qui se destine à… des études de psychologie.
Cycle de vie, cycle d’amour et de renaissance… Joëlle Cattan réussit un récit à la fois onirique et philosophique alliant émotion, sensibilité et espoir.
N N-C
NADA NASSAR-CHAOUL
Née à Beyrouth, Nada Nassar-Chaoul est juriste et professeur de droit à la Faculté de droit et des sciences politiques de l’Université Saint-Joseph de Beyrouth.
À côté de ses nombreuses études et publications juridiques, elle est l’auteur de rubriques décapantes sur le Liban d’après-guerre parues dans L’Orient-Express et groupées dans Frimes et autres délits, ouvrage, paru en 1998 aux éditions Layali.
Depuis 2010, elle est l’auteur du « Clin d’œil » de L’Orient littéraire, chronique socio-humoristique douce-amère du Liban d’hier et d’aujourd’hui.
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