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PATRIMOINE : Amiens sur les pas de Jules Verne

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La Ville d’Amiens aura mis près d’un siècle après sa mort en 1905 pour valoriser le nom de Jules Verne dans sa propre histoire. Il fallut attendre les années 2000 pour que la maison qu’il occupa rue Charles-Dubois soit .entièrement restaurée et ouverte aux visiteurs.
C’est ici, au sommet de sa gloire, que le romancier et son épouse Honorine, devenus riches, donnaient de fastueuses et réjouissantes réceptions; qiue les journalistes du monde entier étaient reçus fès la sortie de ses nouveaux romans de la série « Voyages extraordinaires ».
Lorsqu’après le Seconde guerre mondiale cette habitation devient propriété de la ville, une grande partie du mobilier ayant appartenu à Jules et Honorine Verne fut dispersée ou offerte à la ville de Nantes pour équiper son « musée Jules-Verne ». Pendant des décennies, des pièces de cette demeure remarquable furent laissées à l’abandon, avec des murs suintant d’humidité, couverts de moisissures et de papiers en lambeaux et décollés, avec des pièces aux plafonds crevés.

La mémoire retrouvée à partir des années 2000

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Il fallut attendre les années 2000 pour que la demeure de Jules Verne soit restaurée et transformée en musée digne de ce nom.

Durant l’exercice d’un certain maire d’Amiens, le nom de Verne fut à proscrire de la capitale picarde au motif que le romancier, bien que mondialement réputé, « était un fâcheux réactionnaire qui avait manifesté en son temps son hostilité aux violences de grèves ouvrières et penché du côté des antidreyfusards ».
Il fallut l’exercice de Gilles de Robien à partir de 1989 et sa présidence à la structure intercommunale Amiens Métropole jusqu’en 2008, pour faire revivre dans la cité les années Jules Verne et le génie du romancier. En 2000, il fit mobiliser les finances métropolitaines pour faire l’acquisition de quelque trente mille pièces du collectionneur italien Piero Gondolo Della Riva. Il s’agissait d’un fonds composé des machines fantastiques utilisées par l’industrie cinématographique pour la réalisation des films adaptés de l’oeuvre vernienne : sous-marin Nautilus, machines volantes, affiches de cinéma, appareils de communication, décors spéciaux, etc. Il permit de créer le musée Jules-verne qui faisait tant défaut dans la ville d’adoption du romancier.

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Maurice et Cécile Compère grâce auxquels la mémoire de Jules Verne resta vivante à Amiens malgré une hostilité locale longtemps manifestée à l’égard du célèbre romancier. Ils fondèrent le « Centre international de documentation Jules-Verne » aujourd’hui versé dans le fonds de la bibliothèque de l’Université de Picardie Jules-Verne.

Le fonds de documentation international Jules Verne créé (bénévolement) par M. Maurice Compère et son épouse Cécile, qui occupait l’une des parties privées de la maison de la rue Charles-Dubois, fut transféré à la bibliothèque municipale, puis à la bibliothèque de l’Université de Picardie Jules-Verne. Ce fonds donna la naissance au Centre International Jules-Verne et à son site internet sur lequel l’ensemble des documents collectés par le couple Compère, aujourd’hui numérisés, peuvent être consultés d’un bout à l’autre de la Planète.
Un quartier commercial et industriel situé à la périphérie de l’agglomération fut également dédié à Jules-Verne, avec des noms de rue donnés aux personnages de ses romans.

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Dans « Vingt-mille lieues sous les mers », Pierre Aronnax est le médecin de bord du sous-marin Nautilus

Au cours de l’été prochain, un buste de Jules Verne devrait être installé à proximité de l’hôtel de ville d’Amiens où l’écrivain siégea au Conseil municipal.
La création d’un parcours « Aronnax », du nom d’un des personnages de « Vingt-mille lieues sous les mers », médecin à bord du sous-marin « Nautilus », est une nouvelle étape dans l’identification d’Amiens dans la biographie de Jules-Verne. Ce parcours invite à suivre l’auteur dans ses différents déplacements en ville : gare SNCF, ancienne Caisse d’Epargne, cirque municipal, mairie, cathédrale, ancien théâtre, avec une étape terminale au cimetière de La Madeleine où il repose sous la dalle sculptée par Albert Roze, son ami.
A chaque station du parcours, un panneau explicatif est à la disposition des promeneurs, selon le plan suivant.

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Un buste de Jules Verne, avec des enfants lisant l’un ses romans extraordinaires se trouve à proximité de sa demeure aujourd’hui devenue musée.

Le Saint-Michel III : le yacht de luxe du romancier

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Ce bâtiment amarré dans le port de Sète est le Saint- Michel III, acheté par Jules Verne en 1877 pour la somme de 55 000 francs aux Chantiers Jollet Babin, de Nantes.
C’est un yacht à vapeur de 31 mètres de long (hors tout), 4,60 m de large, 2,90 m de tirant d’eau. Gréé en goélette avec machine à vapeur à double cylindre. Neuf marins commandés par le capitaine Ollive composent l’équipage.
Jules Verrne cependant doit songer à se séparer de ce luxueux yacht, trop coûteux. Il revend le navire en 1886 pour moins de la moitié de son prix d’acquisition, 26 000 francs, à un armateur qui le revendra plus tard au prince de Monténégro.

LIRE EGALEMENT ICI
https://www.amiens.fr/Grands-projets/Aronnax?fbclid=IwAR3_R985ZmMFsEQ4bc2ECIbAbPLR1e9NE8hlrwuumz7qQyI7ZOb_qDyoyD0

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L’oeuvre de Jules Verne : une révolution littéraire au coeur de la révolution industrielle du 19è siècle

Lorsque Jules Verne arrive au monde le 8 février 1828, l’Europe prépare sa grande révolution scientifique, technologique et industrielle. Dans de nombreux pays, des recherches sont faites sur la domestication de l’électricité. Le commerce s’internationalise avec la création de lignes maritimes régulières. C’est le début des premiers chantiers de construction de voies de chemin de fer avec encore le cheval pour force motrice, bientôt remplacé par la traction à vapeur.
Deux ans plus tôt, le physicien Nicéphore Niepce avait découvert les premiers secrets de la photographie. Son procédé sera ensuite amélioré pour faire de l’image sur support sensible un moyen de communication révolutionnaire.
Viendront ensuite, durant son enfance et son adolescence, d’autres inventions pouvant paraître anodines, mais en réalité porteuses de transformation de la société.
Ainsi en est-il de la création de la plume d’acier à écrire qui remplace la plume d’oie. Cette plume entrera dans tous les cartables de jeunes écoliers et facilitera l’accès de tous au savoir lire et écrire, base des libertés fondamentales.

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A 19 ans, étudiant en droit à l’université de Nantes, il écrit ses premières œuvres : « Premier carnet de poésies », « Un prêtre » et « Jéjédias Jamet », romans inachevés, ainsi que « Alexandre VI », tragédie en cinq actes, écrite pour surmonter un gros chagrin d’amour. Celle qu’il aimait, sa cousine Caroline Tronson, s’était mariée durant son séjour à Paris où il préparerait des examens de fin d’année universitaire.
A 20 ans, il continue de se noyer dans l’écriture avec « Second carnet de poésies », « Le quart d’heure de Rabelais », « La conspiration des poudres », « Un promenade en mer » et « La Pologne » ;
Rien de cela n’est publié, et le jeune homme n’imagine pas que le chef de cabinet de Lamartine, ministre des Affaires étrangères de la Deuxième République présidée par Louis-Napoléon Bonaparte, fera un jour sa fortune.
Il s’agit de Pierre-Jules Hetzel, éditeur des meilleurs écrivains de son époque : Balzac, George Sand, Musset, Gérard de Nerval, Victor Hugo, notamment.
Titulaire de diplômes de droit, le jeune Jules est apte à endosser la robe d’avocat. Il refuse cependant de reprendre la charge d’avoué que son père lui propose pour se consacrer à plein temps à l’écriture de pièces de théâtre et d’opérette. Il ne gagne pas trop bien sa vie dans le monde du spectacle, mais il sent en lui une force créatrice puissante qui, un jour, lui apportera le succès.
Sur le plan privé, sa vie amoureuse est un désastre. Toutes les femmes dont il s’est épris ne le veulent pas pour époux. Dans une lettre adressée à sa mère, il confie : « « Toutes les jeunes filles que j’honore de mes bontés se marient toutes invariablement dans un temps rapproché ! Voire ! Mme Dezaunay, Mme Papin, Mme Terrien de la Haye, Mme Duverger et enfin Mlle Louise François. »

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Honorine du Fraysne de Viane, jeune veuve de 26 ans, avec laquelle il se marie à l’âge de 28 ans.

Sa rencontre à Amiens avec Honorine du Fraysne de Viane, jeune veuve de 26 ans, lors du mariage d’un de ses amis, mettra fin à son obsession du mariage. Les deux jeunes gens se plaisent et décident d’unir leurs vies. La noce a lieu à Paris. Il a 28 ans, avec charge de subvenir aux besoins de sa nouvelle famille qui compte les deux jeunes enfants de sa femme nés de son premier mariage.
Afin de s’assurer de revenus solides, il achète une charge d’agent de change. Il partage sa vie entre la Bourse de Paris, et son bureau d’écrivain, avec des détours par des rendez-vous galants avec quelque maitresse, des soirées avec des auteurs, et des voyages vers des pays lointains.
A cause de ses absences prolongées, il ne sera pas là pour la naissance de son fils Michel, arrivé au monde quatre jours avant son retour à Paris.
Pour Honorine de Viane, son second mariage n’est pas ce qu’elle souhaitait. A Paris, elle s’ennuie, et n’a qu’une hâte, retrouver Amiens où vivent ses proches et ses amis.
Plusieurs événements vont lui apporter satisfaction. En 1860,Jules Verne a fait la connaissance du photographe Nadar, passionné de vol en ballon. La même année, l’éditeur Hetzel, qui a dû s’exiler à la suite du coup d’Etat de Louis-Napoléon Bonaparte qui mit fin à la Deuxième République pour instaurer le Second Empire, revient en France. Verne et Hetzel feront connaissance en 1862 et signeront un premier contrat d’édition qui débouchera en 1863 par la sortie de « Cinq semaines en Ballon ». Le succès est immédiat et débouche l’année suivante sur un autre contrat, avec la publication de « Voyage au centre de la Terre », « Le Conte de Chantelaine », « Edgar Poe et ses œuvres ».

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Le roman « Cinq semaines en ballons » publié chez Hetzel amorce une série de succès de librairies qui inonderont les bibliothèques dans le monde entier.

La défaite de Napoléon III à Sedan contre la Prusse, en 1870,accélérera le retour d’Honorine et sa famille à Amiens. Son mari étant mobilisé comme garde-côte au Crotoy, petit port niché dans l’embouchure de la Somme, elle s’installe dans sa ville de cœur où elle se sent en sécurité.
L’année suivante, la signature du Traité de Francfort ayant mis fin à la guerre franco-allemande, la famille Verne s’installe définitivement à Amiens. Jules y écrira plus de la moitié de son œuvre monumentale.
Son roman « Vingt-mille lieues sous les mers » inspiré de ses séjours au Crotoy et de ses navigations à bord de son voilier « Saint-Michel » est un succès considérable.
La suite sera un enchainement de succès de librairie et de titres qui seront traduits dans le monde entier « Le Tour de monde en 80 jours », « L’île mystérieuse », « Le Chancellor », « Michel Strogoff », « Les cent millions de la Begum », « Les Révoltés de la Bounty », « Mathias Sandorf », etc.

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La naissance du train à vapeur et de la création de la Compagnie des Chemin de fer du Nord, sont indissociables de la relation entre Jules Verne et son éditeur Pierre-Jules Hetzel. Ce moyen de locomotion effaçait de plusieurs heures la durée de voyage en Paris et Amiens : quinze heures en diligence et deux heures trente en train. Photo : la gare d’Amiens du vivant de Jules Verne.

Jules Verne voyageait beaucoup, en train ou en bateau, avec des amls le plus souvent, en laissant son épouse à la maison. Il fit de ses pérégrinations l’un des cadres de son roman « Le Tour du Monde en 80 jours » dans lequel Philéas Fogg et son compagnon Passepartout sont engagés dans une course folle pour gagner un pari impossible.

1886 : la fin de ses voyages

La vie de voyageur aventurier de Jules Verne prit fin en 1886. Cette année-là est celle de deux drames majeurs. Le premier est la venue de son neveu Gaston pour lui réclamer de l’argent. Le romancier refuse de donner le moindre sou à ce garçon rongé par ses addictions. Celui, ivre de colère, sort une arme de poing et tire deux balles dans la jambe de son oncle.
Jules Verne ne se remettra jamais de cette blessure qui le fera souffrir et boiter pour le reste de son existence.
Quelques semaines plus tard, le facteur lui remet une lettre l’informant de la mort, à Nice, de son ami et éditeur Pierre-Jules Hetzel. C’est la fin d’une belle et grande période d’amitié et de voyages.
A partir de ce moment, après avoir revendu son luxueux yacht « Saint-Michel III », le romancier limite son périmètre d’occupation à Amiens. Il participe aux réunions de société locales dont il est membre : Académie des arts et lettres d’Amiens, société d’Horticulture.
Elu conseiller municipal, il a en charge la culture et les distractions. Cela le conduit souvent à assister aux premières des spectacles donnés au théâtre municipal situé dans l’artère principale de la ville, la rue des Trois-Cailloux.

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Jules Verne prononça le discours inaugural du cirque d’Amiens dont la construction avait été sévèrement contestée par les opposants à la municipalité républicaine à laquelle il appartenait.

Il préside également l’inauguration du nouveau cirque municipal « en dur » qui remplace un cirque en bois, trop petit pour accueillir le public, et mal sécurisé.
Ses journées se découpent en tranches d’activité bien spécifiques. Debout à cinq heure du matin, il écrit jusqu’à l’heure du déjeuner. Puis il se rend à la Société Industrielle, rue de Noyon, pour compulser les revues scientifiques et techniques pour s’inspirer des dernières inventions afin d’enrichir son œuvre romanesque.
Puis, il s’offre un moment de repos en retrouvant certaines connaissances dans le square Saint-Denis avec lesquelles il échange les dernières nouvelles du pays. L’après-midi s’achève souvent par un passage à l’hôtel de ville pour prendre connaissance des dossiers municipaux dont il a la charge. Puis rentre chez lui – fort probablement en calèche, tant il souffre en marchant.

Me Raymond Poincaré, son avocat dans un procès en diffamation

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Le roman « Face au Drapeau », qui met en scène l’inventeur d’un explosif aux applications militaires, vaut à Jules Verne un procès en diffamation, accusation dont il sera blanchi grâce à la plaidoirie d’un brillant avocat du barreau parisien, Me Raymond Poincaré, futur président de la République.

En 1896, son roman de fiction « Face au Drapeau » lui valut un procès en diffamation intenté par l’ingénieur Eugène Turpin, inventeur d’un puissant explosif, la mélinite. Celui-ci accusait Verne de s’être emparé de son personnage et de son invention pour en faire un homme prêt à trahir son pays pour louer son brevet contre un loyer élevé. Défendu par l’un des ténors du barreau parisien, Me Raymond Poincaré, futur président de la République (et fondateur de la Renaissance Française), Jules Verne sera blanchi des accusations portées contre lui.
Les dernières années de l’écrivain seront celles d’un homme perdant ses forces et la vue. Avec l’âge, il souffre de cataracte. A cela s’ajoute un diabète qui affecte sa vue.
A son décès en 1905, Michel Verne, son fils, fera publier plusieurs de ses œuvres restées inédites – œuvres que Michel aura pu retoucher, remanier, ou écrire en partie à la demande de l’éditeur dans l’esprit de son père.

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La tombe de Jules Verne, au cimetière de la Madeleine, à Amiens. Le sculpteur Albert Roze, ami du romancier, fait jaillir l’écrivain de sa sépulture, le bras dressé vers le ciel et l’éternité céleste.

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